Travaillons ensemble à rendre l’école réellement inclusive !

Lettre ouverte aux enseignants et personnels de l’Éducation nationale

Vous êtes enseignants, personnels de l’Éducation nationale. Vous êtes 93%* à considérer que la scolarisation des enfants en situation de handicap est un droit. Pour nous, associations et organisations qui militons pour une école véritablement inclusive, c’est une source de satisfaction et d’espoir.
Pour autant, nous demeurons inquiets devant des actes, des discours de plus en plus fréquents laissant penser que certains enfants n’auraient pas leur place dans vos classes, au prétexte que l’école n’est pas suffisamment adaptée et que les moyens manquent.
Nous ne méconnaissons pas les difficultés auxquelles vous êtes confrontés : nous savons que vous faites un métier difficile, en témoignent les problèmes de recrutement, les injonctions, les modifications de programme, l’absence de formation continue, les effectifs chargés et le remplacement pas toujours assuré.
Nous savons aussi l’inadaptation de l’École à prendre en compte la diversité des élèves, écartelée entre le dogme de la sélection des élites et l’idéal de la réussite pour tous, entre le tri des élèves et le maintien d’une mixité sociale.
Alors qu’il est quasiment certain que, au cours de votre carrière, vous avez été ou serez concernés par la scolarisation d’un élève handicapé, vous n’êtes que 20% à déclarer avoir reçu une formation spécifique. Nous savons aussi que, faute de n’avoir pas su prendre, en son temps, ses responsabilités, l’Éducation nationale s’est déchargée de la scolarisation des élèves handicapés sur le secteur associatif, créant ainsi deux systèmes parallèles, cloisonnés, dont il nous faut aujourd’hui collectivement gérer l’héritage. Cette réalité n’offre que peu d’alternative à des familles déboussolées, subissant un véritable parcours du combattant pour offrir à leur enfant des conditions dignes d’accueil et de scolarisation, sur la base de l’égalité des chances avec les autres enfants. Mais nous pensons que, dans ce contexte, il ne faut pas se tromper de combat. Depuis quelques années, le concept d’école inclusive, d’école pour tous, s’est imposé dans le débat public. Si le principe ne se discute plus – en théorie -, sa mise en oeuvre reste chaotique et souvent incomprise : non, il ne s’agit pas de faire des économies « sur le dos des élèves » au prétexte que cela coûterait moins cher qu’un établissement médico-social. Non, il ne s’agit pas non plus de fermer arbitrairement ces établissements et d’obliger les enfants à intégrer, contre leur gré, l’école ordinaire. Il s’agit d’interroger, ou plutôt de réinterroger, notre système scolaire afin que l’école puisse être enfin accessible à tous. Alors que la convention internationale des droits des personnes handicapées et les grandes lois nationales d’orientation ont réaffirmé le principe d’une école qui s’adapte aux besoins des élèves, et non l’inverse, comment le mettre en oeuvre, avec quels moyens humains et financiers, avec quelle organisation ? Comment penser collectivement l’accessibilité universelle de notre école, renforcée – autant que nécessaire mais pas plus que nécessaire – par le recours à la compensation pour que chaque enfant puisse être un élève parmi les autres ? Cette école inclusive nécessite en effet un changement de paradigme et repose sur une conception des apprentissages qui demande à être repensée, qui multiplie les formes d’entrée dans les savoirs et propose différents chemins pour y parvenir. Cela doit être accompagné d’un changement profond du système scolaire mais aussi du secteur médico-social, qui ne doit plus être considéré comme une alternative pour les élèves dont l’école ne veut plus, mais comme un dispositif au plus près des établissements scolaires, en capacité d’apporter les accompagnements éducatifs et les soins nécessaires, les ressources et les conseils au service de la réussite des élèves. Il s’agit aussi de mettre en oeuvre collectivement de nouvelles formes d’organisations du travail, basées sur la coopération entre corps de métiers différents, complémentaires devant maintenant apprendre à travailler ensemble. Pour cela, la formation nous parait être un des leviers essentiels, en complément de mesures structurelles (reconnaissance de la charge de travail, effectifs…). Avec les campagnes que nous avons menées sous l’affirmation « ma place, c’est en classe », nous souhaitons pouvoir engager un travail avec vous, la communauté éducative, sur ce qui nous rassemble et sur les moyens pour parvenir à cette école pour tous. Depuis quelques années, les dispositifs plus ou moins expérimentaux se sont développés (Dispositifs intégrés, autorégulation, Pôles Inclusifs d’Accompagnement Localisés, Pôle d’Appui à la Scolarité, Équipe Mobile d’Appui à la Scolarisation…), des fonctions nouvelles ont émergé (enseignants-ressources, référents, accompagnants, coordonnateurs…), bousculant les frontières, modifiant les habitudes de travail mais aussi rendant difficilement lisibles, pour les acteurs, professionnels comme les familles, l’architecture globale et les différents parcours possibles. Nous voyons donc un intérêt commun à oeuvrer ensemble : s’appuyer sur la complémentarité de nos expertises, renforcer la coopération entre tous les acteurs, développer des formations croisées, appréhender et valoriser la diversité des élèves comme une richesse pour tous. Travaillons ensemble à une école véritablement inclusive, une école accessible à tous ! ()


Enquête réalisée par l’IFOP, via questionnaire auto-administré en ligne, du 21 au 27 juin 2024.
L’enquête a été menée auprès :

  • d’un échantillon de 601 enseignants, représentatif du corps enseignant de l’école maternelle au lycée
  • d’un échantillon de 1043 parents d’élèves (scolarisés de la maternelle au lycée).

Les associations membres du Collectif « Ma place c’est en classe » :
ANPEA-APF France handicap-ASEI-Droit au savoir-GAPAS-FCPE-FISAF-FNASEPH-FG PEP-Fédération PEEP-Trisomie 21 France-UNANIMES