source Média-social
Le 28 décembre, le Conseil constitutionnel a annulé la création des pôles d’appui à la scolarité pour les élèves handicapés. Vécue comme un soulagement par les associations et les syndicats, cette censure ne freine pas le gouvernement qui entend passer par la voie réglementaire.
C’est un revers pour le gouvernement dans sa politique pour un « acte 2 » de l’école inclusive : la création des pôles d’appui à la scolarité (PAS), mesure-phare issue de la dernière Conférence nationale du handicap, a été retoquée par le Conseil constitutionnel.
« Cavaliers budgétaires »
Voté dans le cadre du projet de loi de finances (PLF) pour 2024, l’article 233 (ex-53) instituant ce dispositif au sein de l’Éducation nationale fait en effet partie des douze mesures considérées comme des « cavaliers budgétaires » par les sages du Palais Royal dans sa décision du 28 décembre 2023. En clair, ces derniers considèrent que ces dispositions n’ont pas leur place dans une loi budgétaire puisqu’elles ne concernent pas les finances de l’État.
Il va ainsi dans le sens d’un des deux groupes de députés à l’origine de sa saisine, qui estimait que l’article instituant ces PAS prévoyait « la réorganisation des modalités de gouvernance et du fonctionnement de l’école inclusive » sans que cela « ne constitue en tant que telle une dépense nouvelle ».
Soulagement
La mesure était contestée depuis plusieurs semaines par les associations de défense des personnes handicapées. Cette décision est donc accueillie avec soulagement. Sur Twitter, le Collectif handicaps rappelle ainsi que « depuis le début, [il] s’est prononcé contre cet article, qui ne pouvait pas être adopté en l’état ».
L’une des principales critiques portait sur le contenu de la « réponse de premier niveau » dévolue, via les PAS, à l’Éducation nationale pour les enfants présentant des difficultés d’apprentissage. Il était notamment prévu que ces dispositifs puissent définir la quotité horaire de l’accompagnement par des accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH).
Le Collectifs handicaps avait ainsi jugé le texte « trop flou » sur les missions attribuées à l’Éducation nationale et celles relevant de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH).
Dans une motion adoptée le 20 octobre, le Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) avait aussi déploré « le manque de précisions sur le périmètre de décision du PAS ».
Enfin, la présidente de l’association Info droit handicap, Sabrina Alloun, salue, sur Linkedin, la décision du Conseil constitutionnel : « Notre action collective a payé », se félicite celle qui est à l’origine d’une pétition signée par plus de 10 000 personnes contre l’article du PLF.
« Formidable encouragement »
Les syndicats d’enseignants manifestent aussi leur satisfaction. Pour la Fédération nationale de l’enseignement et de la formation professionnelle Force ouvrière (Fnec FP-FO), les PAS visaient à « placer les notifications MDPH sous tutelle de l’Éducation nationale de manière à réduire drastiquement les heures d’accompagnement dues aux élèves en situation de handicap ».
La censure du Conseil constitutionnel représente donc « un formidable encouragement pour tous les personnels dans le cadre de la défense de leurs conditions de travail et des droits des élèves en situation de handicap », poursuit l’organisation.
Même satisfecit de Sud éducation qui juge qu’avec les PAS, « le ministère de l’Éducation nationale ne [mettait] pas en œuvre une vraie politique ambitieuse (…) [mais] se [contentait] d’un bricolage ».
Le gouvernement « déterminé »
Reste que le gouvernement n’a pas dit son dernier mot. Interrogé par Le Media social, le cabinet de la ministre déléguée chargée de l’Enseignement, Carole Grandjean, indique que l’exécutif « reste déterminé à améliorer la scolarité des élèves en situation de handicap et, plus largement, des élèves à besoins éducatifs particuliers en renforçant la coordination avec le médico-social (intervention de personnels médico-sociaux et de personnels de santé en milieu scolaire) et les mesures d’accessibilité (mise à disposition de matériel pédagogique adapté, renforcement de la formation des personnels…), conformément aux orientations annoncées lors de la Conférence nationale du handicap du 26 avril 2023 ».
Cette ambition « était notamment le sens de la réponse de premier niveau qui avait vocation à être apportée par les PAS, sans préjudice des mesures susceptibles d’être mises en œuvre en application des décisions notifiées par les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) », fait-il remarquer.
Le cabinet de la ministre précise enfin que « certaines de ces mesures ne nécessitent pas de texte législatif et pourront donc être mises en œuvre par voie réglementaire ».